L'arrêt du 12 avril 2012 de la Cour de cassation s’appuie sur l’ancien article 2270-1 du Code civil, désormais abrogé par une loi du 17 juin 2008 venue modifier la durée des prescriptions civiles (1). L'action en responsabilité extracontractuelle - responsabilité délictuelle et quasi-délictuelle - se prescrit désormais par cinq ans (2).
Ce qui ne change pas la question de savoir à quel moment la "manifestation du dommage" survient sur Internet. Est-ce lors de la révélation du dommage à la victime ou bien lors de la mise en ligne sur Internet du texte litigieux ?
La Cour de cassation suit l'arrêt de la cour d'appel selon lequel le délai de prescription de l'action en responsabilité extracontractuelle engagée à raison de la diffusion sur le réseau Internet d'un message portant atteinte à la vie privée:
" court à compter de sa première mise en ligne, date de la manifestation du dommage allégué " et non à compter de la révélation du dommage à la victime.
Il sera plus aisé il est vrai de rapporter la preuve de la date de la mise en ligne que de prouver le moment où l'on a eu connaissance du dommage et une solution contraire aurait rendu le délai aléatoire. Ce dernier est par ailleurs calqué sur les délais en matière de diffamation dont l'action se prescrit par trois mois, à compter de la première mise en ligne. Il n'aurait donc pas été cohérent d'en décider autrement...
(1) cf "Réforme de la prescription en matière civile", M. Battisti, Adbs.fr, oct 2008; et "Les nouveaux délais de prescription", Pigeon-bormans.com.
(2) "à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer" (article 2224 du Code civil, toujours en vigueur).
Source : Actualités du Droit du Lamy (arrêt ci-après)
Source : Actualités du Droit du Lamy (arrêt ci-après)
***
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 juin 2011), que la société Nouvelle du Journal de l'Humanité (la société) a mis en ligne, au courant du mois d'août 1996, sur son site Internet des articles concernant l'état de santé de M. X... ; que, considérant que ces informations étaient constitutives d'une atteinte à sa vie privée au regard des articles 9 du code civil et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, M. X... a fait assigner, par acte du 7 septembre 2009, la société devant un tribunal de grande instance en réparation du préjudice résultant de cette faute civile ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de déclarer prescrite son action alors, selon le moyen, que le délai de prescription de l'action en responsabilité extracontractuelle court à compter du jour de la manifestation du dommage causé à la victime ou de la date à laquelle il a été révélé à cette dernière, si celle-ci n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en ayant décidé que le délai de prescription de l'action en responsabilité pour atteinte à la vie privée engagée par M. X... avait couru à compter de la mise en ligne sur l'Internet du texte litigieux au mois d'août 1996 et non à compter de la révélation du dommage à la victime au mois d'avril 2009, la cour d'appel a violé l'article 2270-1 ancien du code civil ;
Mais attendu que le délai de prescription de l'action en responsabilité civile extracontractuelle engagée à raison de la diffusion sur le réseau Internet d'un message, court à compter de sa première mise en ligne, date de la manifestation du dommage allégué ;
Et attendu que l'arrêt retient que le texte incriminé déjà publié sur le support papier le 14 janvier 1991 a été mis en ligne courant août 1996 ; qu'étant exclusif de toute confidentialité depuis cette époque, ce texte ne pouvait être considéré comme "étant clandestin" ; que c'est à partir de cette mise en ligne, équivalente à la mise à disposition du public, que le délai de prescription de dix ans devait être calculé et non à partir des seules constatations de M. X..., datant du 6 mai 2009, soit treize ans après la révélation au public du texte ;
Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'‘appel a exactement décidé que l' action engagée par M. X... était prescrite ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire