4 avril 2012

Qui est donc titulaire du droit moral sur une oeuvre collective ?

L'oeuvre collective revient assez souvent au centre des arrêts de la Cour de cassation ces derniers mois. Il s'agit, rappelons-le, de " l'oeuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction " (art. L 113-5 CPI).

Voici ci-après les attendus principaux de l'arrêt de la 1ère chambre civile du 22 mars 2012, n°11-10.132, destiné à une publication maximale : FS-P+B+I. Cet arrêt tranche la question de la titularité du droit moral en telle hypothèse :
"La personne physique ou morale à l’initiative d’une oeuvre collective est investie des droits de l’auteur sur cette oeuvre et, notamment, des prérogatives du droit moral".

Selon l’arrêt attaqué, la société SDFA, créée par Mme X..., styliste en parfumerie, a employé Mme Y..., en qualité d’abord de salariée, puis de prestataire de services ;
reprochant à cette dernière de présenter comme siennes, sur des documents joints à des courriels ainsi que sur son site internet, leurs propres créations, la société SDFA et Mme X... l’ont fait assigner en contrefaçon de droits d’auteur et en concurrence déloyale.
Vu l’article L. 113-5 du code de la propriété intellectuelle ; 
Attendu que pour déclarer la société SDFA irrecevable à agir sur le fondement de l’atteinte au droit moral d’auteur, l’arrêt énonce que, si Mme Y... demeure titulaire des prérogatives du droit moral qu’elle détient sur ses propres contributions, la société SDFA n’a pas la qualité de créateur et ne peut donc prétendre être titulaire du droit moral attaché à la personne de l’auteur ;
Qu’en statuant ainsi, alors que la personne physique ou morale à l’initiative d’une oeuvre collective est investie des droits de l’auteur sur cette oeuvre et, notamment, des prérogatives du droit moral, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu que la cassation ainsi prononcée entraîne la cassation par voie de conséquence du chef de la demande au titre des actes de concurrence déloyale ;"

Somme toute, cette solution est cohérente avec le fait que les droits patrimoniaux sur l'oeuvre collective reviennent à la personne qui l'édite. Elle contribue de ce fait aussi à faire de l'oeuvre collective un cas à part dans la création salariée : le droit moral n'est pas attaché au créateur !
(Sur les créations salariées, voir l'article "La propriété intellectuelle en entreprise : lien très étroit entre titularité et contrat de travail !", Sur LexGo, 29 nov 2011).


Sandrine Rouja

Arrêt consultable sur le site de la Cour de cassation
et relevé par Dalloz-actualité.



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